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Spectroscopie électronique de certains composés du nickel(II)

Guillaume Bussière et Christian Reber

Département de chimie

Université de Montréal

C.P. 6128, Succursale Centre-ville

Montréal QC H3C 3J7

 

Nous avons étudié par spectroscopie d'absorption une série de complexes octaédriques et tétraédriques du nickel(II). Lorsque le nickel est lié à des ligands de force intermédiaire tel les halogènes, l'eau, les alcools et le DMSO la région du proche IR et du rouge (1000 - 500 nm ou 10000 - 18000 cm-1) montre des caractéristiques très intéressantes.

Le nickel(II) est de configuration 3d8 et possède deux électrons non pairés. Son état fondamental est un triplet (3A2g dans le groupe ponctuel Oh). Dans les complexes octaédriques que nous avons étudiés il existe à l'état excité un croisement entre un état singulet (1Eg Oh, configuration électronique t2g6eg2, identique à celle de l'état fondamental) et un état triplet (3T1g Oh) provenant d'une autre configuration électronique, t2g5eg3. La transition interdite vers le singulet montre une intensité élevée pour une transition interdite et une structure vibronique inhabituelle: les raies qui forment la progression principale sont séparées par un écart plus grand que la fréquence vibrationnelle de symétrie totale à l'état fondamental. En général, on ne s'attend à aucune progression vibronique pour une transition électroniqe entre deux états provenants de la même configuration.

La spectroscopie d'absorption de monocristaux avec lumière polarisée à basse température est appliquée à tout nos complexes pour obtenir des spectres à haute résolution.

Les effets vibroniques ont été reconnus dans le passé et les spectres ont été analysés de façon qualitative. Parmi les modèles proposés pour les transitions dans le proche-infrarouge nous trouvons même très récemment des suggestions aussi variées que l'effet Jahn-Teller dans l'état triplet1 ou une progression du type "deux phonons" dans l'état singulet.2 Les attributions des bandes triplet et singulet ont été discutées de façon vigoureuse dans le passé, sans recours à des modèles quantitatifs.3,4 La théorie du champ des ligands a été examinée et résumée en détail dans la littérature, mais cette approche purement électronique ne permet pas d'analyser des patrons vibroniques.5

Nous avons développé un modèle incluant le couplage spin-orbite qui explique ces observations expérimentales. Notre modèle permet aussi de visualiser directement la dynamique rapide entre l'état singulet et l'état triplet excité de nos complexes. À partir des fonctions d'ondes dépendantes du temps et de leur autocorrélation nous justifions les intensités et les progressions vibroniques qui sont observées dans les spectres d'absorption. À la base du modèle est la mécanique quantique dépendante du temps appliquée aux transitions électroniques.6,7 Une approche automatisée pour l'affinement des paramètres du modèle au spectre expérimental est utilisée et mène à des valeurs optimisées pour les paramètres.

Différentes méthodes de spectroscopie optique ont été utilisése afin d'observer les effets du couplage spin-orbite. Des spectres d'absorption à basse température (5 K) ont été mesurés en utilisant des cristaux, des solutions gelées et des verres amorphes en couche mince. Les composés cristallins [NiCl6]4- dans CsMgCl3, [NiCl2(H2O)4](H2O)2 et [Ni(H2O)6](NO3)2 montrent des spectres particulièrement bien résolus et des effets de polarisation dans certains cas. En utilisant la symétrie de ces molécules (groupe ponctuel) et le couplage spin-orbite nous avons expliqué toutes les observations spectroscopiques.8

Des composés amorphes ou des solutions gelés de certains composés du nickel (ex: NiBr2(DMSO)x, NiCl2/éthylène glycol) montrent aussi des spectres résolus dont les structures vibroniques sont comparables à celles des composés cristallins. Un grand nombre d'autres composés du nickel, entre autres certains de symétrie tétraédrique, montrent des spectres dont la structure vibronique est aussi résolue. Ces résultats experimentaux démontrent que notre modèle s'applique de façon générale et nous permet d'analyser l'ensemble des effets spectroscopiques provenant de l'interaction entre plusieurs états électroniques.

 

Références

(1) Lee, J. D. Concise Inorganic Chemistry, 4th Ed., Chapman and Hall: London, 1991, p. 960.

(2) Benedek, G.; Pollini, I.; Piseri, L.; Tubino, R. Phys. Rev. B 1979, 20, 4303.

(3) Jørgensen, C. K. Acta Chem. Scand. 1955, 9, 1362.

(4) Pryce, M. H. L.; Agnetta, G.; Garofano, T.; Palma-Vittorelli, M. B.; Palma, M. U. Philo. Mag. 1964, 10, 77.

(5) Reedijk, J.; Van Leeuwen, P. W. N. M.; Groeneveld, W. L. Rec. Trav. Chim. Pays-Bas 1968, 87, 129.

(6) Heller, E. J. Acc. Chem. Res.1981, 14, 368.

(7) Reber, C.; Zink, J. I. Comm. Inorg. Chem. 1992, 13, 177.

(8) Bussière, G.; Reber, C. J. Amer. Chem. Soc. 1998, 120, 6306.

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