Dans la plupart des situations cliniques, l'hyperglycémie provoquée orale (HGPO) n'apporte guère plus de renseignements que des glycémies répétées, à jeun ou au hasard. Elle ne permet pas de résoudre les situations difficiles. Le risque que l'HGPO mette en évidence des anomalies modestes, difficiles à classifier, est d'autant plus fréquent qu'elle aura été prescrite judicieusement. Je m'explique. Une HGPO prescrite à tort, si la glycémie de dépistage est très élevée, sera pathologique mais tout à fait inutile. Une HGPO prescrite chez un adolescent mince, sans facteur de risque, avec une glycémie post-prandiale normale, sera probablement normale mais injustifiée. Par contre si le contexte clinique est suggestif de diabète et si la glycémie, à jeun et/ou post-prandiale est limite, l'HGPO risque d'ëtre également limite.
Il reste une place pour l'HGPO en médecine pratique quotidienne. La principale indication est lors de la grossesse: le diagnostic définitif du diabète gestationnel se base sur les résultats de l'HGPO de 100 g sur 3 heures. Je profite de cette occasion pour insister sur le fait que toutes les femmes enceintes doivent être évaluées pour l'intolérance au glucose et que si le test de dépistage choisi est positif, il doit être suivi d'une HGPO.
Il y a d'autres situations ou l'indication d'HGPO est moins rigoureuse quoique souhaitable:
1. quand la glycémie à jeun est normale, mais qu'il y a présence de nombreux facteurs de risque de devenir diabétique (tel histoire familiale, obésité, naissance d'un enfant macrosome, diabète gestationnel antérieur,... ).
2. quand la demande psychologique d'un patient est forte, parce qu'il a pu être effrayé par un diabète dans sa famille ou par des examens antérieurs douteux.
3. parce que, pour des raisons techniques ou socio-économiques, il peut être parfois plus simple de faire venir un patient au laboratoire, à jeun et pendant une période de 2 heures, plutôt que de lui demander de faire à plusieurs reprises des glycémies à jeun et/ou postprandiales.
4. parfois pour déceler une hypoglycémie réactionnelle (il faut poursuivre l'épreuve jusqu'à la cinquième heure), bien que l'on ait de moins en moins recours à l'HGPO pour ce diagnostic car elle s'avère très très peu spécifique.
Enfin soulignons qu'aucune HGPO n'est justifiée si la glycémie à jeun est déjà élevée ou si le patient est hospitalisé, avec une maladie aiguë, ou inactive. Certains médicaments peuvent interférer avec l'interprétation de l'HGPO, (diurétiques, acide nicotinique, b-bloqueurs, stéroïdes). L'HGPO ne doit être faite que si diète et activité physique ne sont pas limités dans les 3 jours qui précèdent le test.
Donc, bien que l'HGPO demeure l'épreuve "étalon" pour diagnostiquer le diabète, son indication en dehors de la grossesse est relativement limitée.
Daniel Caron, M.D.
Endocrinologue.