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Diabète non-insulinodépendant

EXTRAITS DU GUIDE THÉRAPEUTIQUE DE L'HÔPITAL MAISONNEUVE-ROSEMONT

Mise à jour le 27 juillet 1996

Dr Jean-Pierre Hallé, endocrinologue



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I. GÉNÉRALITÉS:

Le diabète non-insulinodépendant est souvent asymptomatique.

Il peut être présent depuis plus de 10 ans lors du diagnostic.

Il est souvent associé à une hypertension, une dyslipidémie, une obésité androïde (abdominale), de la résistance à l'insuline et de l'hyperinsulinémie, tous des facteurs de risque de maladies cardio-vasculaires autrement appelé syndrome X.

II. DIAGNOSTIC:

- Glycémie à jeun 7.8 mmol/L x 2 = diabète

- Glycémie au hasard > 11 mmol/L = très suggestif

- Glycémie à jeun < 7.8 mmol/L. Faire une hyperglycémie provoquée si les antécédents personnels ou familiaux sont positifs pour une histoire de diabète gestationnel, obésité abdominale, dyslipidémie ou complications neurovasculaires du diabète.

III. INTERPRÉTATION DE L'HYPERGLYCÉMIE PROVOQUÉE ORALE DE 75 g DE GLUCOSE:

GLYCÉMIE NORMAUX INTOLÉRANCE DIABÈTE
À Jeun < 7,8 mmol/L < 7,8 mmol/L > 7,8 mmol/L
Temps

30, 60, 90 min.

Tous:

< 11 mmol/L

1 des 3 temps:

> 11 mmol/L

1 des 3 temps:

> 11 mmol/L, ET

120 min. < 7,8 mmol/L 7,8 à 11 mmol/L > 11 mmol/L

Conditions:

En dehors d'une période de stress, assis ou couché
À jeun depuis 10 à 16 h.;
Si le patient est sous diète restrictive, donner 100 g de sucre concentré (ex.: 1 dessert) die pendant les 3 jours précédant l'examen.

III. CLASSIFICATION:

On divise le type II en IIa, non obèse ( 15% des types II) et IIb, obèse (>120% du poids idéal) (85% des types II). L'obésité androïde (abdominale) est associée à l'intolérance au glucose, au diabète et aux maladies cardio-vasculaires.

Le diabétique de type II présente très rarement de l'acidocétose même en période de stress et jamais en dehors d'un stress. Un patient qui a été traité par la diète et les hypoglycémiants oraux plus d'un an avant de débuter l'insuline est plus probablement un type II.

En troisième lieu, on peut avoir un diabète associé à des médicaments (stéroïdes) ou à d'autres conditions comme les diabètes pancréato-prives (pancréatectomie, pancréatite chronique, fibrose kystique) ou associés à des maladies génétiques (ex.: ataxie de Friedreich).

IV. PHYSIOPATHOLOGIE:

Dans l'intolérance au glucose et le diabète de type II (IIa ou IIb) il y a toujours une résistance à l'insuline. Pour avoir une glycémie à jeun 10 mmol/L, on doit avoir aussi une diminution relative de la sécrétion d'insuline (relative par rapport à des sujets normaux à glycémies égales). Ces patients sont quand même hyperinsuliniques parce que la glycémie est plus élevée que celles des normaux. La résistance à l'insuline et/ou l'hyperinsulinémie secondaire joueraient un rôle dans la genèse des complications macrovasculaires. On devra privilégier les traitements qui diminuent la résistance à l'insuline et/ou l'hyperinsu-linémie mais pas aux dépens d'une hyperglycémie.

On appelle glucotoxicité le phénomène par lequel l'hyperglycémie chronique entraîne à la fois une diminution de la fonction sécrétrice des cellules bêta et une augmentation de la résistance à l'insuline. Un traitement intensif pourra briser le cercle vicieux.

V. TRAITEMENT:

Le but du traitement est de contrôler la glycémie et les autres facteurs de risque de maladies cardio-vasculaires et de détecter, prévenir et traiter les complications à long terme.

A. Évaluation initiale et suivi:

L'évaluation initiale comprend l'histoire familiale et personnelle, l'histoire pondérale (poids idéal, poids actuel, indice de masse corporelle), l'identification des facteurs de risque modifiables (tabac, HTA, dyslipidémie, sédentarité, stress), et l'atteinte des organes cibles: troubles visuels, symptômes cardiaques, cérébro-vasculaires et vasculaires périphériques.

Suivi:

1. Examen q 1 à 3 mois ad stabilisation puis q 3 mois, incluant: poids, T.A., discussion des glycémies capillaires s'il y a lieu, hémoglobine A1C et l'examen des pieds.

2. Examen annuel: bilan des complications, consultation en ophtalmologie, examen cardiovasculaire et des pieds, micro-albuminurie des 24 heures, créatinine, électrolytes, cholestérol, triglycérides, HDL-C, LDL-C, ECG à l'effort pour tout diabétique 50 ans ou avec une durée du diabète 20 ans. Si normal, répéter ce dernier examen aux 5 ans.

B. Traitement préventif:

L'exercice physique régulier diminue l'incidence de diabète de type II surtout chez les personnes à risque. Une diète équilibrée et le maintien du poids idéal sont recommandés.

- Intolérance au glucose:

Associée aux autres facteurs de risque (syndrome X) mentionnés ci-dessus et à une incidence augmentée des macroangiopathies mais non des microangiopathies. Traitement: favoriser l'exercice, l'atteinte et le maintien du poids idéal. Rechercher et traiter les autres facteurs de risque mentionnés ci-dessus et le tabagisme.

C. Traitement médical (diabète type II):

1. On débute par les traitements qui diminuent la résistance à l'insuline. Exercice régulier et consultation en diétothérapie. S'il y a surcharge pondérale, la restriction calorique et la perte de poids progressive sont plus importantes que l'absence de sucre concentré.

2. On ajoute par la suite la metformine qui diminue la résistance à l'insuline, ne stimule pas la sécrétion d'insuline et seule, n'induit jamais d'hypoglycémie(dose habituelle 500 mg 1 co t.i.d., dose maximale 2 500 mg/jour).

3. L'étape suivante consiste à ajouter un sulfonylurée: glyburide (dose maximale 10 mg b.i.d.), tolbutamide (dose maximale 500 mg q.i.d.), glyclazide (dose maximale 160 mg b.i.d.). Médicaments d'utilisation plus récente et dont le rôle est moins bien défini: fenfluramine (Pondéral pacaps: anorexiant non amphétaminique, effet de sédation plutôt que de stimulation, pas de dépendance, troubles digestifs fréquents; l'effet anorexiant est variable; aurait un effet direct sur la glycémie. Important de commencer à dose progressive 20 mg die ad t.i.d. puis 60 mg (longue action) die (h.s.). Acarbose: inhibiteur de l'alphaglycosidase qui transforme les disaccharides en monosaccharides (sucres simples absorbables). Aplatit la courbe post-prandiale de glycémie. Effets secondaires: flatulence, diarrhée transitoire.

4. S'il y a échec primaire des agents oraux, on cesse ces derniers et on débute l'insulinothérapie comme dans le diabète de type I. S'il y a échec secondaire (i.e. après une réponse pendant plusieurs années), on peut utiliser la thérapie combinée insuline-hypoglycémiants oraux.

5. Thérapie combinée: insuline/hypoglycémiants oraux:

a. Indications:

échec secondaire des hypoglycémiants oraux. Ne sera efficace que s'il y a persistance d'une réserve endogène en insuline. Même si inefficace, peut être une façon de faire la transition des agents oraux à l'insuline et de débuter l'insuline en externe.

b. Contre-indications (i.e. passer d'emblée à l'insuline seule):

- patients cataboliques

- diabète pancréatoprive

- diabète débalancé par corticostéroïdes

c. Avantages de la thérapie combinée:

Contrôle glycémique identique aux autres protocoles d'insulinothérapie, mais moins de gain de poids, moins d'hyperinsulinémie, meilleure qualité de vie, meilleure acceptation et meilleure compliance au traitement.

d. Modalités: la metformine peut être continuée aux mêmes doses

- Étape 1: diminuer la dose de sulfonylurée de 50% et débuter insuline NPH (humaine) à 21h00 par 10-15 unités. Augmenter de 2 unités q 2-3 jours jusqu'à ce que la glycémie A.M. soit 7,0.

- Étape 2: si la glycémie A.M. 7,0 et les glycémies diurnes (a.c., midi, souper et h.s.) >10, réaugmenter les sulfonylurées ad dose maximale.

- Étape 3: si glycémie A.M. 7,0 et les glycémies diurnes restent élevées, cesser les sulfonylurées et passer à l'insulinothérapie b.i.d. à q.i.d. (cf diabète type I).

D. Traitement des facteurs de risque et des complications:

1. H.T.A.:

On favorise des antihypertenseurs qui n'augmentent pas (ou qui diminuent) la résistance à l'insuline, n'altèrent pas la sécrétion d'insuline et n'affectent pas le profil lipidique. Les premiers choix sont les inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (ECA), les bloqueurs des canaux calciques (on préfère actuellement le diltiazem à la nifedipine car on a rapporté une augmentation de la protéinurie avec ce dernier médicament) et les bloqueurs alpha. Si on doit utiliser un diurétique on préfère l'indapamide aux autres thiazides. On peut utiliser le furosemide en surveillant et en remplaçant le potassium; l'hypokaliémie diminue la sécrétion d'insuline. Les -bloquants sont contre-indiqués chez les patients qui présentent une neuropathie autonome, des hypoglycémies sévères ou une non perception des symptômes d'hypoglycémie. Si on prescrit des -bloquants, on choisira un cardiosélectif avec activité sympathomimétique intrinsèque (ex. acébutolol dose 50 à 100 mg die).

2. Néphropathie diabétique:

En présence de microalbuminurie (30 mg à 300 mg/24 h), intensification du traitement hypoglycémiant (objectif: normalisation de l'HbA1C), diète hypoprotéinée 0,8 g de protéine/kg de poids idéal, inhibiteurs de ECA même si T.A. normale, et/ou diltiazem, traitement antihypertenseur énergique

3. Rétinopathie:

Importance de l'examen ophtalmologique annuel car la rétinopathie est asymptomatique jusqu'à un stade avancé. Le laser est efficace.

4. Pieds diabétiques:

Neuropathie sensitive, motrice et autonomique. Insuffisance vasculaire. Polynévrite douloureuse. Carbamazépine, débuter à 200 mg t.i.d. Effet peut prendre 1 à 2 semaines. Diminuer à la dose minimum efficace. Amitryptiline 50 mg h.s. Analgésique: capsaïcine en crème (inhibiteur de la substance P); très coûteuse, augmentation de la douleur au début. À noter que lors de l'intensification du contrôle, la douleur peut augmenter au début (regénération des fibres nerveuses). Prévention des ulcérations, mal perforant plantaire, infection fungique, cellulite et gangrène. Les conseils sur les soins des pieds peuvent diminuer les amputations de 50%. Si sécheresse de la peau (neuropathie autonome) la lanoline ou autre crème hydratante prévient les fissures, porte d'entrée pour les bactéries. Débrider les callosités, chaussures souples, orthèse au besoin, traitement énergique des cellulites (voir cellulite). Si la guérison est lente ou s'il y a récidive de cellulite ou mal perforant plantaire associé, rechercher une ostéite (Rx et cartographies).



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