Projets en cours
Les polymères semi-cristallins (polyoléfines, polyesters, nylons, etc.) constituent une des classes
les plus importantes de matériaux. En plus des paramètres habituels, telle la longueur de la chaîne et sa
conformation, les propriétés de ces polymères dépendent de leurs caractéristiques cristallines, dictées
autant par la cinétique que la thermodynamique. Nous nous intéressons à leur cristallisation sous forme
de films minces et ultraminces (moins de 100 nm d’épaisseur) parce que les nanotechnologies
requièrent pour de nouvelles applications (microélectronique, revêtements, surfaces antiréflection,
dispositifs électrochimiques, photorésists, capteurs, etc.) des films de plus en plus minces; et de
nouvelles techniques, telle la microscopie AFM, donnent accès à cette information. En film ultramince, la
cristallisation est 2-D plutôt que 3-D puisque l’épaisseur du film est de l’ordre de grandeur du rayon de
giration de la chaîne.
Les polylactides existent sous deux formes isotactiques différentes : le poly(L-
lactide) (PLLA) et le poly(D-lactide) (PDLA) – deux polymères optiquement actifs. Lors
de la cristallisation de films ultraminces, ils présentent des lamelles cristallines sur la
tranche qui cristallisent en courbant avec une courbure en forme de S dans le cas du
PLLA et de Z dans le cas du PDLA. Si ce même polymère est cristallisé en masse (film
épais de plusieurs micromètres), la courbure des lamelles sur la tranche en films minces a
son pendant dans le twisting des lamelles cristallines des sphérolites (observés par
microscopie optique). Ainsi, nous pouvons relier les divers niveaux d’organisation des
polymères via un transfert de chiralité : deux molécules de configurations différentes donnent lieu en solution à deux conformations
différentes (hélices droite et gauche), qui à leur tour induisent des lamelles sur la tranche de courbure en directions opposées (niveau
lamellaire) et, enfin, à des lamelles dont la rotation est gauche ou droite (niveau sphérolitique).
Ces mêmes polylactides peuvent se complexer, c’est-à-dire former une nouvelle structure cristalline (ou stéréocomplexe
(PLLA+PDLA)) qui fond à 240oC relativement à 180oC pour le PLLA (ou
PDLA) seul. En film ultramince, les stéréocomplexes équimolaires
présentent des monocristaux hexagonaux réguliers bien, qu’en dessous
de 30 nm, la structure devienne dendritique. Par contre, quand le
mélange PLLA/PDLA est non-équimolaire, les monocristaux prennent une forme triangulaire; les branches dendritiques de ces cristaux
courbent dans le sens des aiguilles d’une montre lorsque le PLLA est majoritaire et dans le sens contraire lorsque le PDLA est majoritaire.
Les travaux actuels visent à comprendre ce phénomène qui dépend, à la fois, de l’épaisseur des films, de sa composition et de la température
de cristallisation.
De façon plus générale, nous nous intéressons à la cristallisation et à la morphologie
des mélanges polymères sous forme de films épais et minces. Pour des films épais du
mélange miscible polycaprolactone/polychlorure de vinyle (PCL/PVC), nous observons deux
vitesses de cristallisation et deux morphologies différentes, phénomènes qui n’apparaissent
pas lors de la cristallisation de la PCL pure. La première morphologie est classique : elle est
sphérolitique; la deuxième est peu biréfringente et semble caractérisée par des lamelles
couchées à plat. Nous avons établi que les sphérolites se forment dans le cœur du matériau
alors que la deuxième entité se retrouve à la surface du film. Les différences de cinétique de
cristallisation s’expliquent, au moins en partie, par l’enrichissement de la surface des
mélanges en PCL (démontré par spectroscopie XPS) mais les morphologies restent à élucider.
Finalement, nous nous intéressons aussi aux copolymères blocs (en collaboration avec C.G. Bazuin), systèmes multiphasés, organisés
à l’échelle nanométrique par auto-assemblage. Avec le copolymère poly(styrène)/poly(vinyl pyridine) (poly(S-b-VP), nous obtenons, aux
concentrations choisies, des nodules ordonnés dans lesquels se retrouve une petite molécule détachable. Les interactions petite molécule/PS
et petite molécule/PVP contrôlent la formation d’entités verticales plutôt qu’horizontales (de dimensions de quelques dizaines de nm). Pour
de potentielles applications biologiques, nous avons préparé des poly(lactide-b-
méthacrylate de 2-diméthylaminoéthyle) (poly(LA-DMAE)). Le premier bloc de
ce polymère est semi-cristallin, biodégradable et biocompatible; le deuxième bloc
est soluble dans l’eau, porte des groupements amine tertiaires et complexe des
molécules fonctionnelles par chimie supramoléculaire. La présence d’un bloc
cristallin conduit à la stabilisation de la morphologie à cause de la forte tendance
à cristalliser de ce bloc; d’autre part, le deuxième bloc, amorphe, impose des
contraintes qu’il reste à explorer pour le poly(LA-DMAE).
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