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Contenu
- Avant-Propos
- L'épidémiologie chez les enfants et les adolescents (Bergeron, Valla, & Gauthier)
- La neurobiologie des troubles anxieux (Gendreau & Ravacley); en format PDF
- L'évaluation des troubles anxieux chez les enfants et les adolescents (Bouvard, Dantzer, & Turgeon)
- Le traitement des troubles anxieux chez les enfants et les adolescents: données actuelles et perspectives futures (Turgeon, Brousseau, & Denis)
- Évaluation et traitement du trouble obsessionnel-compulsif à l'enfance et l'adolescence (Berthiaume, Turgeon, & O'Connor)
- Évaluation et traitement du trouble post-traumatique chez les enfants et les adolescents (Bériault, Berthiaume, Brunet, & Turgeon)
- Phobie sociale à l'adolescence: une recension des écrits (Monfette & Boisvert)
Avant-Propos
Les troubles anxieux (anxiété de séparation, anxiété généralisée, phobie sociale et agoraphobie, phobies spécifiques, trouble obsessionnel-compulsif, trouble de stress post-traumatique) sont parmi les psychopathologies développementales les plus fréquentes chez les enfants et les adolescents. Les connaissances sur le traitement de l’anxiété pathologique chez les jeunes ont ainsi fortement progressé au cours des 20 dernières années. Initialement, les rares publications sur le sujet se résumaient le plus souvent à des études de cas sur le traitement de phobies spécifiques. Puis vers 1990 sont apparues les premières études expérimentales évaluant l’efficacité de l’approche cognitivo-comportementale dans la réduction de l’anxiété généralisée chez les enfants. Ces travaux, menés notamment par Kendall aux États-Unis, ont incité plusieurs équipes de recherche en Amérique du Nord, en Europe et en Australie à poursuivre l’élaboration d’interventions de ce type pour traiter les différente manifestations de l’anxiété pathologique chez les jeunes. La thérapie cognitivo-comportementale est à l’heure actuelle la forme d’intervention la plus efficace pour traiter les problèmes d’anxiété chez les jeunes. Telle est la conclusion du rapport de l’INSERM sur l’efficacité de la psychothérapie, publié en France en 2004. Bien qu’un bon nombre de traitements standardisés et de manuels cliniques soient maintenant disponibles, ils sont toutefois mal connus des intervenants en santé mentale. En ce sens, un important travail de diffusion reste à faire.
Il ne fait nul doute que la pharmacothérapie est efficace pour réduire certains symptômes de l’anxiété pathologique chez les adultes. L’efficacité de cette approche chez les jeunes, particulièrement chez les enfants de moins de 12 ans, demeure toutefois équivoque. De plus, un important débat est engagé sur les risques associés à l’utilisation d’anxiolytiques/ antidépresseurs chez les adolescents et les plus jeunes. Les enfants ne sont pas des adultes en miniature; leur environnement et leur biologie sont en constante modification. Par conséquent, la prescription de médicaments chez les jeunes doit être accompagnée d’un suivi très étroit. Plus d’études pharmacologiques expérimentales à long terme, avec et sans la présence d’une thérapie cognitivo-comportementale, seront nécessaires afin de se prononcer sur l'efficacité de la pharmacothérapie chez les enfants et les adolescents.
Parallèlement aux travaux sur le traitement des troubles anxieux chez les enfants, les vingt dernières années ont également permis un accroissement important des connaissances sur l’étiologie de l’anxiété pathologique chez les jeunes. On peut penser ici aux travaux de l’équipe de Kagan sur l’inhibition comportementale en bas âge et le développement de l’anxiété. Par ailleurs, on s’intéresse de plus en plus au lien possible entre un attachement mère-enfant dysfonctionnel et l’émergence de l’anxiété pathologique. Ces questions fondamentales sont essentielles pour l’établissement d’un modèle théorique explicatif du développement des troubles anxieux; elles contribuent également à l’évolution des champs de pratique. Par exemple, ce sont les connaissances sur le rôle de la psychopathologie parentale et de certaines pratiques parentales comme la surprotection qui ont incité certains chercheurs à ajouter une composante familiale à l’intervention. Les signes précoces de l’anxiété pathologique, autrefois négligés, sont devenus des indices importants pour guider les efforts de prévention des troubles anxieux. L’épidémiologie des différents troubles anxieux chez les jeunes s’est rapidement précisée et de nombreux outils d’évaluation, sensibles et valides, ont été créés.
Ce livre fait le point sur les connaissances fondamentales et appliquées en lien avec le traitement des troubles anxieux chez les enfants et les adolescents. De tels ouvrages sont rares sinon inexistants en français. Le premier chapitre (Bergeron, Valla et Gauthier) porte sur l’épidémiologie des troubles anxieux et aborde le rôle de certaines caractéristiques familiales dans l’émergence de l’anxiété pathologique. Le deuxième chapitre (Gendreau et Ravacley) traite de la neurobiologie des troubles anxieux et intègre les plus récentes études sur la génétique, les mécanismes cérébraux et la neuropharmacologie de l’anxiété. Le troisième chapitre (Bouvard, Dantzer et Turgeon) introduit les principaux outils d’évaluation des troubles anxieux, en privilégiant ceux qui sont disponibles en français. Le chapitre 4 (Turgeon, Brousseau et Denis) présente une recension des études d’efficacité des traitements psychologiques et pharmacologiques des troubles anxieux. Les trois derniers chapitres portent respectivement sur le trouble obsessionnel-compulsif (Berthiaume, Turgeon et O'Connor), le trouble de stress post-traumatique (Bériault, Berthiaume, Brunet et Turgeon) et la phobie sociale (Monfette et Boisvert). Nous avons choisi de mettre l’emphase sur ces troubles étant donné que ce sont ceux pour lesquels les connaissances sont encore le plus limitées.
Malgré la récente progression des connaissances dans le domaine des troubles anxieux chez les enfants et les adolescents, de nombreux défis restent à relever. Il faut d’abord souligner le problème de la reconnaissance de l’importance du problème, tant auprès des intervenants et des gestionnaires que des parents et des jeunes eux-mêmes. En effet, parce qu’ils perturbent davantage la cohésion sociale, ce sont avant tout les troubles extériorisés (trouble des conduites, trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité) qui sont ciblés par les intervenants. Les enfants anxieux ne dérangent généralement pas l'ordre établi et à moins de présenter également un trouble extériorisé, ces enfants passeront inaperçus au risque d'une aggravation des troubles et des conséquences qui leur sont associées au plan scolaire, familial, relationnel et plus tard vocationnel. Et lorsque ces enfants présentent à la fois des troubles extériorisés et des troubles anxieux, ce sont d'abord les premiers qui seront traités. Il importe de mieux comprendre les origines développementales de l'anxiété pathologique.
Quels sont les facteurs génétiques et environnementaux qui prédisposent à l'émergence des différents troubles anxieux? Comment ces facteurs influencent-ils le développement et les mécanismes biologiques qui sous-tendent la manifestation de l'anxiété? Ces connaissances sont nécessaires pour identifier les enfants qui sont le plus à risque de développer des troubles anxieux. La création de questionnaires ou de protocoles d'observation valides et spécifiques à cette population doit se poursuivre. Ces outils seront nécessaires pour mesurer l'efficacité des programmes de prévention et d'intervention auprès des enfants et des adolescents.
Lyse Turgeon et Paul L. Gendreau